Prendre soin de soi après un incident critique

DEUXIÈME MODULE | Prise en charge des traumatismes et des incidents critiques pour les travailleurs humanitaires

SEPTIÈME PARTIE | Prendre soin de soi après un incident critique

Lorsque vous vivez un événement traumatique, votre corps entre dans un état d’alerte extrême, ce qui constitue une réaction allostatique normale. Il est donc normal de présenter certains symptômes de stress et de traumatisme. En général, ces symptômes s’estompent, voire disparaissent, avec le temps. Cependant, vous pouvez prendre des mesures afin d’aider votre corps à faire face aux réactions traumatiques afin que vous ne demeuriez pas en état d’alerte plus longtemps que nécessaire. Voici quelques suggestions pour prendre soin de vous dans les jours et semaines suivant un événement traumatique. Ce ne sont là que des suggestions. Certaines peuvent fonctionner pour vous, d’autres non. La manière dont vous réagissez à un événement traumatique vous est totalement unique.  
Il n’y a pas de « solution universelle ».

À faire… 

Après un événement traumatique, il peut être utile de :

  • Passer en revue ce que vous savez sur le stress, les traumatismes et les méthodes de résistance et d’adaptation. N’oubliez pas que vous réagissez sûrement de manière normale face à un événement anormal.
  • Faites du sport. Par le biais d’un processus assez complexe impliquant le fonctionnement de l’amygdale, il a été démontré que le mouvement et l’exercice physique peuvent aider à dissiper certains des changements émotionnels qui suivent une expérience de stress toxique (Van Der Kolk, 2006). Nous espérons que vous pratiquez déjà une activité physique régulière dans le cadre de votre plan de résilience. Si vous n’avez pas l’habitude de faire du sport, consultez d’abord votre médecin.
  • Soyez extrêmement prudent. Évitez de réaliser des tâches et activités trop exigeantes ou qui nécessitent une concentration trop intense (comme faire votre budget ou effectuer des activités physiques compliquées ou dangereuses, comme le déminage.) Après un événement traumatique, il se peut que vous éprouviez des difficultés à vous concentrer normalement. Le risque d’erreur est plus élevé que d’habitude.
  • Essayez de conserver un emploi du temps normal, actif et productif. Modifiez votre emploi du temps en fonction de vos besoins et prenez en compte certaines des autres suggestions de cette liste.  Cependant, n’oubliez pas que de réaliser des activités normales et pratiques (travailler ou s’occuper de ses enfants, par exemple) peut fournir une structure et une certaine normalité pouvant être bénéfiques à long terme.
  • Accordez-vous davantage de temps pour accomplir des tâches ordinaires. Essayez de conserver une routine normale mais concentrez-vous sur des tâches qui ne nécessitent pas beaucoup de réflexion et peuvent être réalisées en peu de temps.
  • Structurez votre journée de manière à passer du temps seul et du temps avec d’autres personnes. Passer du temps avec votre famille et vos amis peut s’avérer très important et peut vous aider à vous sentir moins isolé.
  • Autorisez-vous à éviter les personnes que vous trouvez épuisantes et déprimantes. Au cours des jours et semaines qui suivent un événement traumatique, il est normal de vous occuper de vous, par exemple en laissant votre répondeur prendre des messages à votre place. Indiquez poliment aux gens que vous préféreriez parler d’autre chose si vous n’avez pas envie de parler de ce qui s’est passé. C’est le moment de vous occuper d’abord de vous-même.
  • Communiquez. Il peut s’avérer utile de parler de vos expériences et de vos réactions avec des personnes que vous connaissez, appréciez et en lesquelles vous avez confiance. Il peut également s’avérer utile de parler à un conseiller. Parfais, il est plus facile de parler à un étranger que de partager des détails angoissants avec un membre de votre famille ou un ami proche. Cependant, ne laissez personne vous forcer à parler de l’événement. Il vous importe de décider quand vous souhaitez en parler.
  • Racontez vos expériences et réactions par écrit. Des études indiquent que l’écriture peut être thérapeutique après un événement traumatique ou angoissant. Racontez donc vos expériences et sentiments sur papier.
  • Essayez de vous détendre avec des choses que vous aimez faire. Vous pouvez lire, écrire, faire du sport, explorer un endroit magnifique ou regarder un film, par exemple.
  • « Travaillez » votre détente. Mettez du temps de côté pour essayer diverses méthodes de relaxation, massages thérapeutiques, yoga, relaxation musculaire progressive et bains chauds.
  • Reposez-vous sans compter. Prenez le temps de vous reposer même si vous ne parvenez pas à dormir. N’oubliez pas que les troubles du sommeil et les changements d’habitudes de sommeil sont courants en cas de traumatisme.
  • Mangez bien et équilibré. Mangez régulièrement, même si vous n’avez pas faim.
  • Prenez des décisions concernant des événements quotidiens. Prenez des décisions sur de petites choses, comme par exemple ce que vous souhaitez manger à midi, même si vous n’en avez pas envie. Vous aurez ainsi l’impression de reprendre le contrôle de votre vie.
  • Prenez contact avec un professionnel de la santé mentale. Prenez contact avec un conseiller si vous vous sentez vraiment oppressé ou si vous avez besoin d’un soutien supplémentaire pendant cette période difficile.

À ne pas faire…

Certains mécanismes d’adaptation (comme l’alcool) peuvent sembler très efficaces pour vous aider à éliminer la douleur immédiate liée au traumatisme. Ces activités et ces substances offrent un certain plaisir, améliorent votre humeur, fournissent une échappatoire, et peuvent vous soulager de la tension à court terme. À long terme, cependant, ces stratégies de résistance et d’adaptation peuvent avoir des effets négatifs et finalement renforcer votre état de détresse. Voici quelques exemples de stratégies de résistance et d’adaptation pouvant avoir des aspects autodestructeurs à long terme : les jeux d’argent, la recherche de sensations fortes, la nourriture, la colère, les dépenses excessives, les relations sexuelles irresponsables ou impulsives, l’automutilation, le surmenage au travail et l’isolation des personnes que vous appréciez (Lewis, Kelly & Allen, 2004). Après avoir vécu un événement traumatique, vous devez être conscient de la manière dont vous utilisez les stratégies de résistance et d’adaptation potentiellement dangereuses ou dont vous en abusez.

Voici des choses à éviter après un événement traumatique (particulièrement pendant les premiers jours suivant l’événement) :

  • Ne vous considérez pas fou ou faible. Reconnaissez que vous réagissez sûrement de manière normale à un événement anormal.
  • Ne prenez pas de grandes décisions ou n’effectuez pas de grands changements dans votre vie. Ne décidez pas de démissionner ou de divorcer, particulièrement durant les premiers jours ou semaines suivant un événement traumatique. Vous ne vous trouvez sans doute pas au meilleur de votre forme et ce n’est pas le moment de prendre des décisions importantes.
  • N’augmentez pas votre consommation d’alcool, de drogue ou de cigarettes, votre participation aux jeux d’argent, etc. dans les jours qui suivent un événement traumatique. Tout cela peut vous permettre de vous sentir mieux à court terme, mais ne fera qu’aggraver les problèmes (ou même en créer de nouveaux) à long terme.
  • Ne consommez pas trop de caféine ni d’autres excitants. Votre corps est déjà « remonté à bloc » et ces substances ne feront qu’augmenter votre niveau d’éveil.
  • N’essayez pas « d’oublier » l’événement. N’essayez pas d’éviter toute pensée ou sentiment relatif à l’événement en travaillant plus que d’habitude ou en faisant d’autres choses pour avoir une distraction à tout moment.
  • Ne vous coupez pas de votre entourage. Même si vous ne leur parlez pas de ce qui s’est passé, le fait de passer du temps avec d’autres personnes peut vous aider. Essayez de passer du temps avec des personnes que vous appréciez et qui vous font vous sentir en sécurité et ancré dans le présent.
  • Ne regardez pas de films ou de séries télé violents, ne lisez pas de livres violents. Cela pourrait déclencher un sentiment de détresse lié à l’événement traumatique que vous venez de vivre. 

Activités spécifiques à envisager :

Si vous ne savez pas exactement quoi faire pour vous sentir mieux, voici quelques suggestions qui pourraient vous aider :

  • N’ayez pas peur de pleurer.
  • Écrivez, dessinez ou utilisez un autre moyen vous permettant d’exprimer vos sentiments sans forcément y associer des mots.
  • Effectuez une activité répétitive que vous trouvez absorbante ou apaisante. Par exemple, essayez de jouer au solitaire, à des jeux vidéo, faites des puzzles, des Sudoku, du jardinage ou balancez-vous dans un fauteuil à bascule. Des études ont démontré que le fait de jouer à Tetris ou à un jeu de visualisation spatiale similaire peut réduire l’occurrence de flashbacks après un événement traumatique (Holmes, 2009).
  • Discutez avec un conseiller, un ami de confiance ou un membre de votre famille.
  • Lisez.
  • Regardez un film.
  • Passez du temps à l’extérieur, dans la nature.
  • Essayez des exercices de visualisation. Par exemple, imaginez mettre la détresse dans une boîte, fermer le couvercle et mettre la boîte en lieu sûr afin de pouvoir la récupérer plus tard. Vous pouvez également essayer de vous imaginer dans l’endroit le plus sûr et le plus tranquille que vous connaissez.
  • Faites du sport.
  • Concentrez-vous sur votre respiration et entraînez-vous à faire des exercices de respiration profonde. Si vous n’en connaissez aucun, efforcez-vous de respirer lentement, profondément et volontairement par le ventre. Après deux minutes, vous remarquerez que votre rythme cardiaque ralentit et que vous vous sentez plus calme.
  • Tenez un objet que vous considérez spécial et qui vous apaise.
  • Écoutez de la musique relaxante.
  • Prenez un bain chaud ou une douche chaude. 
© Headington Institute 2013